LETTRE OUVERTE DE JACQUES LAZURE
Tous en conviennent : l’heure est à la réflexion sérieuse sur l’avenir du PQ et, par ricochet, sur le projet de souveraineté du Québec. Malgré la défaite cuisante du PQ, ce projet reste vivant chez nombre de souverainistes. Mais sa promotion doit être repensée, remise à neuf pour être vraiment efficace et aboutir un jour à l’atteinte de son objectif. Voilà pourquoi je propose ici une nouvelle approche dans la promotion de la souveraineté.
On déplore souvent la division des forces souverainistes qui s’éparpillent, parfois en s’entre-déchirant, entre divers partis politiques. Pour y remédier, on suggère des formes de convergence de ces partis souverainistes. L’intention est bonne, mais forcément irréalisable. Tant que la promotion de la souveraineté sera principalement confiée à des partis politiques, elle restera très faible, pour ne pas dire souvent lettre morte, et une convergence effective des énergies souverainistes ne pourra s’établir. Pourquoi? Parce qu’il est de la structure, de la nature même des partis politiques de s’opposer, de s’affronter, de se livrer une lutte entre eux. La dynamique propre des partis politiques les pousse vers la divergence. Plus ils sont forts, plus ils vont en ce sens. C’est quand ils sont faibles, se sentent instables et menacés qu’ils s’ouvrent un peu à la convergence et à la collaboration. On le voit bien dans les gouvernements minoritaires; c’est alors qu’ils sentent le besoin de converger quelque peu, d’ailleurs dans un but bien particulier, celui de rester au pouvoir ou d’y accéder un jour. Le phénomène de coalition des partis, durant la période électorale ou après, le démontre aussi clairement : c’est pour parvenir au pouvoir ou pour s’y maintenir qu’on la réalise.
L’objectif immédiat d’un parti politique est très différent de celui de la promotion de la souveraineté. Le premier cherche à obtenir le pouvoir pour un groupe particulier, tandis que la seconde vise l’indépendance politique de toute une société. C’est pourquoi leur dynamique, leur démarche pour atteindre leur but sont et doivent être tout à fait autres. Il faut alors absolument que la promotion de la souveraineté ait sa propre existence et dynamique, en dehors de l’orbite des partis politiques souverainistes.
Je propose donc que tous les partis souverainistes s’entendent pour mettre sur pied un mouvement politique (pas un parti!) qui existerait et agirait en dehors d’eux, de façon strictement autonome. La tâche unique de ce mouvement serait de débattre en public et sans arrêt le projet de souveraineté du Québec, de le faire dans tous les milieux — à la télévision, à la radio, dans les médias sociaux, les cégeps, les universités, les groupes communautaires, les assemblées syndicales, les communautés culturelles — de promouvoir ce projet par des interventions incessantes, des conférences, des colloques sur la base de rapports d’études, de mémoires blindés d’arguments sensés et approfondis exposant à la fois les faiblesses de notre statut de province, les iniquités que nous cause le gouvernement fédéral et les avantages que nous procurerait un statut de pleine indépendance et liberté.
Je sais qu’il existe déjà des mouvements indépendantistes en dehors des partis politiques souverainistes. L’idée serait que ceux-ci fassent union pour rencontrer ceux-là et voir avec eux s’il ne serait pas possible que tous les mouvements fusionnent en un seul, global. Et s’ils ne veulent pas, à tout le moins qu’ils établissent ensemble un programme méthodique et cohérent de promotion, de manière à éviter les heurts et à couvrir tous les champs d’activités.
On réalise maintenant que le projet de souveraineté dépérit dans plusieurs couches de la société, spécialement chez les jeunes. Pour le raffermir, il faut de la présence continuelle, de la communication, du dialogue, de la persuasion. Les fameuses « conditions gagnantes » dont parle le PQ, on dirait qu’il ne fait que les attendre, comme si elles devaient surgir par elles-mêmes, par magie et enchantement. De fait, jamais un parti politique, si souverainiste soit-il, ne pourra de lui-même et seul réaliser le travail d’éducation de la société nécessaire à la naissance de ces « conditions gagnantes ». Un travail d’éducation qui, pour les partis, n’entre pas dans leur visée et leur dynamique immédiates qui sont celles d’arriver au pouvoir. Seul un mouvement politique, créé et fonctionnant en dehors des partis souverainistes, peut entreprendre et réussir ce travail de longue haleine d’une éducation de la société québécoise susceptible de préparer un terreau favorable à un référendum positif sur sa souveraineté.
C’est donc une immense oeuvre de pédagogie intelligente et enthousiaste que je propose, à réaliser par un mouvement politique indépendant, et où la pure stratégie n’occupe plus le premier plan. Où au contraire prédomine le souci de la transformation d’une mentalité collective passant de l’ignorance et de l’aliénation à la maîtrise lucide de son destin.
Le temps presse, il faut agir vite!
Jacques Lazure, Ph. D. (Harvard)
Sociologue retraité de l’UQAM
On déplore souvent la division des forces souverainistes qui s’éparpillent, parfois en s’entre-déchirant, entre divers partis politiques. Pour y remédier, on suggère des formes de convergence de ces partis souverainistes. L’intention est bonne, mais forcément irréalisable. Tant que la promotion de la souveraineté sera principalement confiée à des partis politiques, elle restera très faible, pour ne pas dire souvent lettre morte, et une convergence effective des énergies souverainistes ne pourra s’établir. Pourquoi? Parce qu’il est de la structure, de la nature même des partis politiques de s’opposer, de s’affronter, de se livrer une lutte entre eux. La dynamique propre des partis politiques les pousse vers la divergence. Plus ils sont forts, plus ils vont en ce sens. C’est quand ils sont faibles, se sentent instables et menacés qu’ils s’ouvrent un peu à la convergence et à la collaboration. On le voit bien dans les gouvernements minoritaires; c’est alors qu’ils sentent le besoin de converger quelque peu, d’ailleurs dans un but bien particulier, celui de rester au pouvoir ou d’y accéder un jour. Le phénomène de coalition des partis, durant la période électorale ou après, le démontre aussi clairement : c’est pour parvenir au pouvoir ou pour s’y maintenir qu’on la réalise.
Sociologue retraité de l’UQAM
abolition des partis politiques, je me croyais le seul à le dire depuis des dizaines années qu'aucun parti politique ne peut rallier assez de personnes pour en arriver à faire un pays avec le Québec. Jacques Lazure a parfaitement raison. première étape comprendre la démocratie directe citoyenne, écrire notre constitution, le pays arrivera par la suite parce que le peuple l'aura voulut naturellement.
RépondreSupprimer